Au revoir là-haut débute en 1918, à la fin du conflit de la Première Guerre Mondiale en France. Albert et Édouard sont deux soldats français qui attendent la fin de la guerre. Ils n’ont plus envie de se battre et à l’instar de milliers d’autres soldats, rêvent de retrouver leurs familles. Alors que l’armistice est à portée de main, Édouard est blessé et Albert décide de s’occuper de lui. Mais les deux vont rapidement découvrir que la France est plus préoccupée par la glorification de ses morts que de s’occuper des vétérans de retour de la guerre.

Auteur : Pierre Lemaitre

Date publication : 2013

Éditeur : Le livre de poche

Protagonistes principaux : Albert Maillard, Édouard Péricourt, Marcel Péricourt, Madeleine Péricourt, Henri Aulnay-Pradelle

Fait exceptionnel, j’ai d’abord vu le magnifique film éponyme d’Albert Dupontel avant de lire le roman de Pierre Lemaitre. Et je peux affirmer avec la plus grande des certitudes que les deux sont absolument parfaits. Le réalisateur a en effet parfaitement capturé l’essence du roman pour le rendre plus vivant encore, si c’est possible. Et c’est possible.

Que dire de plus ? Au revoir là-haut de Pierre Lemaitre n’est pas un livre que l’on lit mais un livre que l’on dévore. Ligne après ligne, phrase après phrase, on se prend de passion pour ce duo improbable condamné à vivre après avoir survécu à la guerre. Le ton est donné dès le départ. Les soldats sont épuisés par la guerre. Ils n’en peuvent plus. Brisés physiquement ou mentalement, parfois même les deux, ils se trainent dans un conflit qui semblent ne pas vouloir finir. Édouard sort de la guerre en tant que « gueule cassée », un soldat défiguré qui a eu la bouche arrachée. Il ne possède désormais plus qu’un trou qui lui permet de produire des sons inaudibles. Il est incrédule. Comment cela a-t-il pu se produire alors que l’Armistice est sur le point d’être signée ? Il voulait juste sauver son camarade Albert, coincé sous terre.

Difficile de faire un duo plus dépareillé. Édouard est un jeune homme de bonne famille, un génie du dessin connu pour ses espiègleries. Il s’entend bien avec sa sœur Madeleine mais entretient des relations exécrables avec son père Marcel, un être rigide, déçu par le comportement de son fils. Cet homme puissant, respecté et craint à la fois, possède des relations dans les plus hautes instances du pouvoir. Quant à Albert, avant le début de la Première Guerre Mondiale, c’était un comptable parfaitement respectable. Mais avec la guerre, sa personnalité craintive et hésitante va lui permettre d’accomplir de grandes choses. C’est lui qui va en effet prendre soin d’Édouard, et l’aider à disparaitre. Il sera prêt à tout pour ça, voler, mentir et même trahir. Édouard est en effet son seul ami. Et les deux hommes sont liés par un même désir. Le désir de vengeance. Car si Albert s’est retrouvé sous terre, c’est après avoir découvert les malversations du capitaine Pradelle, qui l’a trahi de la pire des façons. Et c’est pendant qu’il tentait de le sortir de terre qu’une bombe allemande est tombée sur eux.

De retour à Paris, ils découvrent une réalité à laquelle ils ne s’attendaient pas. Le mépris de la France pour ses vétérans. Le gouvernement se presse et ouvre les caisses de l’État pour organiser des cérémonies militaires et faire construire des monuments aux morts, mais oublie les soldats vivants de retour de la guerre. Personne ne sait que faire de ces morts-vivants qui errent comme des âmes en peine. Ceux qui ont encore de la famille tentent de reprendre une activité normale. Les autres se contentent de survivre. C’est déjà pas mal. Les douleurs d’Édouard sont telles qu’il devient dépendant aux médicaments. Il ne peut désormais plus passer une journée sans sa dose de morphine, une dose de plus en plus forte. Le jeune homme ne sortant jamais de chez eux, c’est à Albert qu’il revient la lourde tâche de se ravitailler en médicaments. Pauvre Albert. Pendant que son ami sombre dans la drogue et la dépression, leur survie à tous les deux repose entièrement sur lui.

Mais Albert découvre rapidement que son pire ennemi, le capitaine Pradelle, s’est très bien remis de la guerre. Devenu un homme riche et puissant, il gravite désormais dans les hautes sphères du pouvoir, avec tous ceux qui ont profité du conflit pour s’enrichir. Insulte suprême, il se fait de l’argent grâce au commerce des cadavres des soldats français. En effet, après la guerre, les familles voulaient récupérer les dépouilles de leurs défunts et pouvoir se recueillir sur leurs tombes. Son travail consiste donc à récupérer les corps et les enterrer. Du moins, c’est le plan. Car très vite, il va révéler son caractère fourbe et cupide.

Albert et Édouard n’est peuvent plus de vivre une vie de misère, comme des parias de la société. Oubliés par l’État, méprisés par la société, ils décident alors de se venger. Et quelle plus belle façon de le faire que de voler le gouvernement, celui-là même qui ne veut rien avoir à faire avec eux ? Ils montent alors une escroquerie extraordinaire : créer une arnaque aux monuments aux morts. Leur plan est simple. Édouard fait des croquis de monuments aux morts qu’il propose à des collectivités à un prix défiant toute concurrence. Il leur demande ensuite de leur envoyer un premier acompte afin de confirmer la commande. Il ne leur restera plus ensuite qu’à partir avec la caisse, sans avoir délivré une seule statue.

Bien sûr, Albert stresse, angoisse, réfléchit, stresse encore, se persuadant qu’ils vont être arrêtés. Tandis qu’Édouard se prend au jeu, reprenant enfin vie. Le lancement du plan semble lui donner des ailes. Aidé par la petite fille de la femme qui leur loue un logement, il porte désormais de sublimes masques de papier mâché, décorés de plumes et autres ornements. Plus c’est flamboyant, plus c’est impressionnant. Je ne tourne pas les pages assez vite, je ne lis pas assez vite à mon goût. Je n’ai qu’une seule envie, que ma lecture ne s’arrête jamais. Mais en même temps, je veux connaitre la fin de l’histoire. Même si j’ai déjà vu le film. L’un des points forts du roman Au revoir là-haut, est que l’auteur nous offre les points de vue de tous les personnages principaux, et d’autres secondaires. Albert est maladroit et craintif. Édouard ne vit que pour sa douleur. Marcel vit dans le regret de ne pas avoir été plus proche de son fils. Henri est un opportuniste intéressé. Et Madeleine devient ce que l’on attend d’elle, l’épouse d’Henri. Mais elle ne se laisse pas conter fleurette et n’est pas dupe sur ce qu’il est réellement.

Vous avez sûrement dû comprendre que j’ai adoré Au revoir là-haut. C’est un roman incroyablement bien écrit, avec un style très graphique dans le sens où il est très facile de s’imaginer les scènes. A lire sans attendre !

Si vous avez aimé Au revoir là-haut, je vous conseille de regarder le film Au revoir là-haut d’Albert Dupontel et de lire Les Couleurs de l’incendie de Pierre Lemaitre.

Au revoir là-haut-Pierre Lemaitre

You may also like

1 Comment

  1. Pingback: Adieu les cons, du très grand Dupontel Les toiles de la culture - Les aventures d'une chercheuse d'histoires

Leave A Comment

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *