Gareth Jones, jeune journaliste idéaliste britannique, s’est fait connaître grâce à une interview d’Hitler. Pour son prochain fait d’arme, il désire interroger Staline, rien que ça. Il veut connaitre le secret du miracle économique soviétique. Gareth Jones se rend donc à Moscou, où il est surveillé par le pouvoir en place. Il suit une piste qui le mène en Ukraine, où il va tomber sur une vérité qui va changer sa vie à jamais. Telle est l’histoire de L’ombre de Staline.
Quelle œuvre… Agnieszka Holland a réalisé un travail remarquable en suivant les traces de ce journaliste plein d’idéaux qui va être confronté à la pire des réalités. L’histoire vraie d’un homme qui a dû se battre pour révéler la vérité au monde, quitte à perdre son innocence.
« Des hommes ont pensé qu’ils pouvaient changer le cours de la nature »
1933. Conseiller en politique étrangère auprès de Georges Lloyd, le jeune Gareth Jones tente de convaincre ses collègues de la dangerosité d’Hitler et de l’Allemagne nazie. Mais ils le moquent et ne portent aucun crédit à ses allégations. Il exprime alors le désir de se rendre en Russie pour découvrir le secret de la prospérité économique soviétique. Lorsqu’il perd son travail en raison de problèmes économiques, il décide quand même de voyager en Russie afin de creuser la piste. Sur place, il est confronté à la réalité soviétique : on le suit, ses sources se dérobent et personne ne semble prêt à lui fournir des informations. L’un de ses contacts lui parle alors de l’Ukraine, où il se déroulerait des faits inquiétants. Il se rend sur place et à faire la lumière sur la situation. Une situation qu’il n’aurait jamais pu imaginer.
Les prémices de la Seconde Guerre Mondiale
L’ombre de Staline est un film qui se déroule à l’aube de la Seconde Guerre Mondiale mais qui pourrait prendre place de nos jours. Le sujet du film est en effet la recherche et le dévoilement de la vérité en opposition aux fake news qui sont désormais prépondérantes. Gareth veut révéler la vérité au monde, mais personne ne veut le croire. Gareth veut être entendu mais personne ne veut l’écouter. Personne n’est prêt à contrarier l’Union soviétique et perdre les avantages qu’il gagne à être de son côté.
Des personnages travaillés
Les personnages principaux vont être confrontés à des choix, qui vont déterminer le reste de leur existence. Peter Sarsgaard est Walter Duranty, directeur du New York Times. Contact de Gareth à Moscou, il mène la belle vie avec sa femme et son fils. Il est dans les petits papiers des Soviétiques à qui il rend des services en échange de faveurs. Duranty est le personnage corrompu par excellence qui a abandonné tout principe et toute valeur. Peter Sarsgaard est formidable, jouant à la perfection cet homme prêt à tout pour conserver son train de vie.
Vanessa Kirby joue le rôle d’Ada Brooks, la meilleure journaliste du New York Times. Excellente dans son métier, elle aide Gareth dans sa recherche de la vérité, même si elle affiche une certaine sympathie pour le pouvoir en place. J’ai beaucoup aimé cette actrice que j’avais aperçu pour la première fois dans Mission Impossible : Fallout et Fast and Furious : Hobbs & Shaw. Elle nous dévoile une nouvelle facette de son talent dans L’ombre de Staline. Une facette très intéressante, qui me donne envie de voir plus de ses œuvres.
Notre héros est Gareth Jones, interprété par le talentueux James Norton. C’est un homme droit dans ses bottes, la valeur morale du film. Du début à la fin, il refuse de transiger. Il veut dire la vérité au monde, quelles qu’en soit les conséquences pour lui. Dans la première partie du récit, il cherche la vérité. Dans la deuxième partie, les faits lui sont dévoilées. Et dans la dernière partie, il veut raconter les éléments qu’il a découvert. Et c’est tout ce processus que L’ombre de Staline nous raconte. Le combat de cet homme seul pour raconter ce qu’il a vu résonne toujours aujourd’hui, dans l’Amérique de Trump. Une Amérique où la vérité est du côté des plus puissants. Cet homme devenu journaliste de terrain est prêt à tout risquer pour devenir un lancer d’alerte.
« L’histoire connait des cycles. Tout comme la nature. »
Ce casting intriguant va jouer au jeu du chat et de la souris, les uns voulant faire la lumière sur la situation ukrainienne et les autres voulant la dissimuler à tout prix. Tous les coups sont permis.
Agnieszka Holland, une réalisatrice de talent
L’ombre de Staline a été réalisé par Agnieszka Holland, l’une de plus célèbres réalisatrices polonaises. Elle est notamment connue pour ses œuvres qui décrivent l’Holocauste. Avec L’ombre de Staline, elle nous raconte l’Holodomor, la grande famine qui a touché l’Ukraine et entrainé la mort de millions d’habitants. Elle nous montre des images sans concessions et des situations d’une incroyable dureté. La population a tout perdu, elle meurt de faim et les cadavres s’accumulent dans la neige. Certaines scènes sont vraiment perturbantes, voire choquantes, mais elles sont nécessaires pour bien appréhender ce qui se déroule en Ukraine. Le titre est également bien trouvé car nous ne voyons jamais Staline, même si nom est régulièrement évoqué. Il plane sur le film mais n’apparait jamais, telle une présence lointaine. Il apparait comme préservé de toutes les accusations alors qu’il en est le principal investigateur.
L’ombre de Staline est un film à ne pas manquer, un drame qui met à la fois l’accent sur un pan de l’histoire européenne peu ou pas connue, la famine en Ukraine, et la volonté d’un homme de rendre ces faits publics et connus de tous.
Bande-Annonce
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