1823, en Afrique de l’Ouest. Le Royaume de Dahomey et le Royaume d’Oyo sont en proie à une lutte de pouvoir. Le premier veut s’affranchir du commerce des esclaves alors que le second veut développer sa puissance en s’appuyant sur cette économie. Mais le roi de Dahomey peut compter sur les Agojié, des combattantes d’élite, avec The Woman King à sa tête.
J’ai été très impressionnée par The Woman King. Je m’attendais à quelques-chose, mais pas à quelque-chose d’aussi bien. Gina Prince-Bythewood, la réalisatrice, a fait un gros travail au niveau des costumes, des décors, de l’histoire et des dialogues. Viola Davis est monstrueuse. Dans le bon sens du terme. On ne voit qu’elle. Elle est si impressionnante que j’avais envie de lui obéir quand elle donnait des ordres.
Le Royaume de Dahomey et ses guerrières d’élite
Le film commence sur les Agojié qui vont récupérer des femmes qui ont été kidnappées. Elles se montrent sans pitié. Ce sont des combattantes aguerries qui s’entrainent pendant des mois. Elles sont adulées par les habitants qui n’ont pas l’autorisation de les regarder, sur ordre du roi. A leur tête se trouve Nanisca, une générale qui a fait ses preuves. Elle est plus que respectée. Elle est presque aussi vénérée qu’elle est crainte. Sa réputation et son courage sont telles, qu’elle est écoutée par le roi. Ce qui la place en porte-à-faux avec ses épouses, jalouses d’une telle promiscuité.
Petit à petit, le Royaume de Dahomey se trouve à un carrefour. Et le roi Ghézo doit prendre une décision. Conserver son alliance avec le Royaume d’Oyo, qui tire sa puissance de l’esclave ou créer sa propre économie basée sur des activités agricoles. Nanisca exprime son mécontentement sur le fait de vendre leurs prisonniers, notamment aux esclavagistes portugais.
Pendant ce temps, les Agojié accueillent de nouvelles recrues. On devient une Agojié par choix, les femmes sont libres de rester et d’apprendre à se battre ou à partir et vivre leur vie comme elles l’entendent. Si elles décident de rester, elles doivent abandonner toutes idées de former une famille et de se mettre en couple. Elles doivent être prêtes à se battre et à mourir pour le roi et le royaume.
La jeune Nawi est a été amenée au palais par son père, qui n’arrivait pas à la marier. Devenue inutile à ses yeux, il veut la mettre au service du roi. La jeune femme de 19 ans se montre à la fois impressionnée et arrogante. Agaçante et trop sûre d’elle, elle est recadrée à plusieurs reprises par Nanisca et Izogie, une guerrière plus expérimentée. Mais Nawi n’abandonne jamais. Elle rêve d’intégrer la troupe d’élite. Et fera tout pour y parvenir. Alors que l’entraînement des recrues se poursuit, dans l’ombre, le royaume d’Oyo se prépare à la guerre…
Des Agojié aux Dora Milajae
On va le dire tout de suite. Toutes ressemblances entre les Agojié et les Dora Milaje de Black Panther n’est pas fortuites. Les créateurs se sont en effet fortement inspirés de ces combattantes d’élite africaines qui ont réellement existé. Surnommées les Amazones, les guerrières du Royaume de Dahomey (actuel Bénin), étaient vraisemblablement recrutées par faire face à la pénurie d’hommes. Elle se sont battues avec vigueur jusqu’au XIXème siècle, avec l’arrivée en masse des troupes françaises. Ces derniers ont ensuite placées la région sous protectorat et le groupe a été dissout par le souverain.
Armées d’épées, de lances et d’armes variées, les Agojiés n’ont pas peur de la mort. Elles sont menées par la charismatique Viola Davis. Très figée, presque glaciale au début, elle s’adoucit petit à petit jusqu’à devenir plus humaine. Lorsque l’on apprend son histoire, on comprend mieux son comportement. Viola Davis est tellement formidable que je ne serais pas surprise ou choquée si elle remportait des prix d’interprétation. Elle est monumentale. On sent qu’elle s’est investie corps et âme dans ce film. Elle donne tout. Tant physiquement qu’émotionnellement.
Des combattantes et guerrières d’élite
Les autres actrices sont tout aussi formidables. Thuso Mbedu (Nawi) est totalement crédible. Tour à tour tête-à-claque, têtue, énervante et courageuse, elle s’accroche à son rêve de devenir une Agojié. Izogie, interprétée par Lashana Lynch, est une guerrière au passé tragique qui a décidé de voir la vie avec humour. Elle se bat avec son épée et ses ongles acérés qu’elle utilise pour arracher les yeux de ses adversaires. Sheila Atim tient le rôle d’Amenza, la confidente et meilleure amie de Nanisca. Amies depuis des années, les deux femmes n’ont aucuns secrets l’une pour l’autre. Mais c’est également une combattante redoutable. Le monarque est interprété par John Boyega. Le roi Ghézo a pris la tête du royaume après la mort de son père et de son frère. Très soucieux de la protection de son peuple, il ne craint pas de demander l’avis du Générale Nanisca, même si c’est une femme.
Les Agojié sont des guerrières. L’entrainement est dur, physiquement et mentalement. Les scènes de combat sont spectaculaires car très réalistes. Ici, pas d’effets spéciaux. Toutes les actrices se sont entrainées au maniement des armes, et le résultat est au rendez-vous devant l’écran. J’avais envie d’attraper une arme et de me joindre au combat. Elles se battent à armes égales avec des hommes. Elles se jettent sans peur dans la bataille. La réalisation est superbe, les scènes d’action extrêmement bien filmées. Gina Prince-Bythewood a fait un très beau travail.
The Woman King, un film profond
The Woman King est un film de guerre mais aussi un film politique. Les Agojié ont beau être un groupe d’élite, elles vivent sous la coupe du roi, dans un palais interdit aux hommes. Elles n’ont pas le droit d’avoir de vie de famille ou de vie de couple. Elles sont dédiées corps et hommes au monarque. Donc on peut se poser la question, mis à part le prestige et la force que leur confère leur entrainement, d’un point de vue personnel, quelles sont les avantages à être une Agojié ? Car elles sont soumises au roi. Lui désobéir peut entrainer leur mort.
L’autre point très important est la question de l’esclavage. Le sujet est abordé dès le départ. Car les Agojié vendent leurs prisonniers. Certes, Nanisca veut cesser ce commerce, mais il existe. Ils en retirent en effet des ressources. Le Royaume de Dahomey s’oppose directement au Royaume d’Oyo, dont c’est le principal commerce. Ce dernier veut s’emparer du port afin de poursuivre ses affaires tranquillement. Ils n’ont aucun problème à vendre leur propre peuple. J’ai lu que le film avait connu quelques polémiques, car on lui reprochait de minimiser le rôle des Agojié et du Royaume de Dahomey dans la traite des esclaves. Je pense que c’est pour ça qu’il est toujours important de faire ses propres recherches et de ne pas prendre un film qui s’inspire de faits réels pour un documentaire. Les faits sont romanciser.
Côté costume et décors, les reproductions sont parfaites. On passe de la tenue de combat au simple pagne, avec des cheveux naturels, au tressage plus ou moins élaboré. Toutes les tenues sont magnifiques. Les décors très réalistes. Bref tout est beau.
The Woman King n’aurait pu être qu’un énième film d’action, mais Gina Prince-Bythewood est parvenue à faire un film d’action, un film politique et un film féministe. Une très belle réussite.
Bande-annonce
Vous avez aimé The Woman King ? Je vous conseille Black Panther, Mad Max: Fury Road ou encore Terminator 2 : Le Jugement dernier.
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